jeudi 13 mars 2014

L'image de marque face à l'effet "Streisand"


Qu’est-ce que l’effet "Streisand" ? 
L’effet Streisand sert à « désigner l'effet pervers selon lequel toute tentative de censure ou de camouflage en ligne accélère au contraire la propagation du contenu que l'on souhaite cacher. Cette tentative génère une publicité d'autant plus négative pour le censeur que les conséquences d'une absence de censure auraient probablement été nulles. » [1]

La première victime de cet effet est la chanteuse Barbra Streisand en 2003, qui a poursuivi en justice un photographe qui avait pris en photo sa villa. Cette photo a été reprise par plusieurs médias et a été vue 420 000 fois dans le mois suivant sa publication. [2] Pour l'anecdote, voici la photographie dont il est question :

Source : http://www.lemonde.fr/vous/article/2012/07/27/un-effet-presque-streisand_1739230_3238.html

Les entreprises face à l’effet "Streisand"
L’effet Streisand peut aussi concerner les entreprises qui cherchent à effacer un contenu provenant de sources diverses (journalistes, consommateurs, salariés, etc.) qu’elle considère comme indésirable et nuisible à son image de marque.

Une étude intitulée Image de marque et Internet : comprendre, éviter et gérer l’effet « Streisand » (Liarte Sébastien, Université de Lorraine), disponible au lien suivant : http://www.etatsgenerauxdumanagement.fr/egm2012/ddoc-279-S9-S.Liarte.pdf, présente 3 cas d’entreprises qui ont subies l’effet Streisand : Ralph Lauren, General Mills et Nestlé. Ces 3 cas ont un point commun : la diffusion rapide des informations sur les réseaux sociaux, relayée ensuite par la presse ou la télévision (médias de masse), venant amplifier le phénomène de diffusion.

Néanmoins, l’impact sur l’image de marque et la rentabilité des entreprises concernées par l’effet Streisand est difficile à mesurer. Le cours de l’action de l’entreprise Nestlé - dénoncée le 16 mars 2010 par Greenpeace au sujet l’utilisation importante d’huile de palme pour fabriquer ses produits - est passé de 51.20$ à la fermeture au 18 mars 2010 à 50.60$ le lendemain à l’ouverture. [3] Finalement, gérer une situation engendrée par l’effet Streisand s’avère dans tous les cas un processus coûteux, en particulier lors de poursuites juridiques : frais d’honoraires, recours à des experts en e-réputation, mobilisation de personnel en interne.

Comment les entreprises peuvent-elles éviter l'effet "Streisand"?
D'après le document Image de marque et Internet : comprendre, éviter et gérer l’effet « Streisand » [3], 3 stratégies peuvent être mises en place pour éviter ou diminuer l'impact de l'effet Streisand : 
1) Faire appel à des agences spécialisées dans la gestion de l’e-réputation 
2) Utiliser les communiqués de presse, mais sans en faire un usage exagéré
3) Développer un argumentaire fort pour légitimer et donner de la crédibilité à la réaction de l’entreprise face à la volonté de prise de contrôle de l'information
Pour ma part, je pense que le contrôle excessif de l'information par les marques peut s'avérer contre-productif et dégrader encore plus l'image de marque en cas de censure ou de réponse juridique inadaptée.

Sources :
[1] http://www.journaldunet.com/ebusiness/marques-sites/effet-streisand/definition.shtml
[2] http://www.infos.fr/linkeo-com-ou-l-histoire-dun-effet-streisand-23838.html#ixzz2vu2kv6LL, et http://www.lemonde.fr/culture/article/2013/10/31/le-buzz-que-l-on-ne-voulait-pas_3506528_3246.html
[3] Image de marque et Internet : comprendre, éviter et gérer l’effet « Streisand » (Liarte Sébastien, Université de Lorraine), disponible au lien suivant : http://www.etatsgenerauxdumanagement.fr/egm2012/ddoc-279-S9-S.Liarte.pdf, consulté le 13/03/2013

6 commentaires:

  1. L’effet Streisand est intéressant et j’ai vu une certaine opposition avec l’exemple de Toyota que vous avez exprimé au début du blogue. Bien sûr, Toyota n’avait d’autres choix que de faire des rappels de véhicules, mais en ne tentant pas de cacher la vérité, elle a su protéger sa réputation. Je ne crois pas qu’un cynisme se soit instauré envers Toyota et je n’hésiterais pas à me procurer une voiture de cette compagnie.

    Par contre, celles qui tentent de cacher la vérité ou de minimiser les impacts – ex : BP avec l’incident du Golfe du Mexique – ont souvent des répercussions à long terme. Comme quoi ce n’est pas une mauvaise idée d’être transparent et d’expliquer les faits rapidement. Le même concept s’applique en politique, comme le démontre la campagne actuelle.

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Bonjour Pete,

      Je te remercie pour ton commentaire. En effet, on peut dire que d’une certaine façon, Toyota a su éviter l’effet Streisand en annonçant le rappel de ses véhicules. De plus, je suis d’accord avec toi lorsque tu dis que l’effet Streisand peut s’appliquer à d’autres contextes comme la politique, pour laquelle une bonne communication joue un rôle central pour se démarquer de ses adversaires. La diffusion d’information gênante est donc parfois moins compromettante que de vouloir la cacher à tout prix.

      Effacer
  2. Il est intéressant de discuter de l’effet Streisand à une époque ou le transfert d’information via la technologie et les médias sociaux est plus facile que jamais. Je crois par contre que tous et chacun est libre d’avoir sa propre opinion. Certains vont prendre pour acquis que ce qu’ils vont lire est véridique et automatiquement adopter le même avis tandis que d’autre vont conserver leur propre opinion et remettre en question ce qu’ils ont vu à la télévision ou via les réseaux sociaux. Donc je crois qu’il est très possible que cet effet puisse à la fois avoir des impacts positifs et négatifs. Ce qui me fait penser à la phrase « parlez s’en en bien, parlez s’en en mal, mais parlez s’en ! » Il est certain que de faire la manchette aux nouvelles et faire le tour de facebook ou twitter pour de mauvaises raisons n’est pas souhaitable pour les organisations. Mais d’un autre coté, il s’agit d’une belle vitrine publicitaire gratuite. ( Il s’agit de la gravité de la chose, bien entendu !)

    Comme vous l’avez mentionné dans votre billet les impacts sur l’image de marque et sur la rentabilité est difficile à établir.

    Je crois par contre qu’il pourrait être intéressant de valider l’information à savoir quels sont les impacts négatifs de l’effet Streisand, et s’il est possible qu’il y’ait également des impacts positifs, et si oui, quels sont-ils ?

    RépondreEffacer
  3. Bonjour Alexandre,

    Merci pour ton commentaire. L’effet Streisand est une forme de bad buzz, et je pense aussi que chacun a sa propre perception des informations qui sont publiées sur les réseaux sociaux.

    Je dirais que les principaux impacts négatifs de l’effet Streisand sont l’atteinte de la réputation de l’entreprise, ainsi que la perte de confiance de certains consommateurs.

    A mon avis, je ne pense pas qu’on peut vraiment parler d’impact positif de l’effet Streisand, mais plutôt d’une opportunité de retourner la situation à son avantage. Par exemple, l’article disponible au lien suivant http://news.social-dynamite.com/le-bad-buzz-peut-etre-une-opportunite-pour-les-entreprises, donne l’exemple de 3 bad buzz qui ont été retournés à l’avantage de la marque. Le premier exemple concerne « EA Sports, qui après un signalement de bug dans l'un de leurs jeux a sorti une vidéo reprenant ce bug pour verser dans l'autodérision » (détail disponible ici : http://www.blueboat.fr/les-3-bad-buzz-les-mieux-rattrapes). Il s’agit d’une façon efficace de gérer une « crise » de ce type, afin d’atténuer les effets négatifs et même tirer profit de la situation.

    RépondreEffacer
  4. Votre billet portant sur l'effet Streisand est vraiment intéressant et montre d'autant plus l'importance à une entreprise d'être transparent pour garder sa crédibilité face à ses parties prenantes afin de garder l'intégrité de son image de marque. De même, comme là mentionné Alexendre Fournier il est d'isoler l'impact de ce "bad Buzz" puisqu'il a un certain impact négatif, mais aussi positif en ce qui a trait à la visibilité de l’entreprise,

    De même, il serait intéressant de se demander si une analyse coût/bénéfice pourrait être effectuer dans ce sens si par exemple pour ce qui est de Nestlé si les économies de l’utilisation importante d’huile de palme pour fabriquer ses produits étaient supérieures au cout relie a l’image de marque et si ce choix d’utilisé l’huile de palme avait était fait en prenant en considération l’impact négatif si cela allait faire manchette. Ce qui nous amène à nous questionner si une entreprise peut décider délibérément de faire manchette pour accroitre sa notoriété médiatique comme c’est le cas d’actrice ou de chanteuse peu connu qui font manchette et devient des personnalités connues dû à ces bad buzz ou si pour une entreprise de tels leviers de popularité n’est pas possible. De plus, il serait aussi intéressant de se questionner sur comment de telles externalités peut être prise en compte que ce soit dans le choix de produit ici pour Nestlé de l’huile de palme ou non.

    François Lauziere

    RépondreEffacer
    Réponses
    1. Bonjour François, et merci pour ton commentaire.

      Une analyse coût/bénéfice serait en effet intéressante dans le cas de Nestlé. Je pense aussi qu'il faut resituer cette analyse en fonction de la stratégie à long terme de l'entreprise, car même si si les économies de l’utilisation importante d’huile de palme pour fabriquer ses produits étaient supérieures au coût relie a l’image de marque, il faut que l'entreprise reste cohérente avec sa stratégie. Je reprends en fait l'idée de Shank et Govindarajan, dans leur ouvrage "Strategic cost management: the new tool for competitive advantage", selon laquelle la gestion des coûts doit s'inscrire dans la stratégie de l'organisation, et même lorsque une offre est intéressante en termes de réduction des coûts, il faut préalablement étudier le positionnement stratégique de l'entreprise : différentiation du produit ou domination par les coûts.

      Effacer