Débutons avec l’exemple suivant, qui illustre bien les enjeux liés
à la valeur financière des marques : En décembre 1997, Coca-Cola
souhaitait acquérir la marque Orangina et offrait à cette dernière 5 milliards
de francs, soit trois fois le chiffre d’affaires de l’entreprise visée.
Coca-Cola a par la suite revu son offre à la baisse, offrant cette fois-ci 4,7
milliards de francs (il est à noter que la transaction n'a finalement pas eu
lieu). Qu’est-ce qui pousse alors une entreprise à offrir un si gros montant
et qu’est-ce qui justifie les sommes mises sur la table? « Le
savoir-faire des salariés? La qualité des outils de production? Certainement,
mais pas seulement (1) ». Ce qui intéresse les entreprises en général,
c’est le potentiel de la marque convoitée et les revenus futurs reliés à
l’exploitation d’une telle marque. Les marques ont donc une valeur et ce sont
les différentes fusions-acquisitions des dernières années qui sont à l’origine
de cette prise de conscience.
La valeur d’une marque peut être évaluée sous différentes
perspectives. En effet, « l’analyse de la valeur financière de la
marque est le fait de trois mondes ayant chacun leur vision : le
juridique, le financier et le marketing. Aujourd’hui, ces compétences se
rejoignent pour certains. Les cabinets d’audit font souvent appel à des
instituts d’études marketing. Et ces derniers commencent à allier compétences
marketing et expertises comptables pour ouvrir des filiales spécialisées en
évaluation financière des marques (2) ». Dans la mesure où l’on décide
d’évaluer la valeur d’une marque uniquement en fonction d’éléments financiers,
plusieurs questions doivent être posées dans le but de déterminer si l’on est
en présence d’un actif. À savoir (3) :
Existe-t-il une protection juridique?
La marque est-elle séparable du reste de l’entreprise?
Est-elle capable de générer des revenus au-delà du simple produit
ou de générer des revenus dans d’autres domaines?
Est-on vraiment en face d’actifs qui peuvent être vendus comme
tels?
L’estimation strictement financière dispose d’une large palette de
méthodes (qui feront d’ailleurs l’objet d’un second billet). Chez
Interbrand par exemple, « les critères de calcul de la valeur associent
la performance financière, l’influence de la marque sur la décision d’achat,
son poids sur son marché et une estimation de ses revenus futurs (4) ».
L’étude en question prend en compte trois critères, soit 1) la performance
financière des produits ou des services de la marque en question, 2) le rôle
joué par la marque dans le choix des clients et 3) la force de la marque pour
imposer le prix fort ou garantir des revenus à l’entreprises (5). D’ailleurs,
selon le classement annuel établi par le cabinet Interbrand pour l’année 2013,
Apple, Google et Coca-Cola se retrouvent sur le podium du classement des
meilleures marques au monde. En d’autres mots, ces trois entreprises sont les
marques qui ont le plus de valeur au monde. Pour la première fois cette année,
la marque Coca-Cola se retrouve au troisième rang, derrière Apple au premier
rang et Google au second, alors que la marque de boissons gazeuses occupait le
premier rang en 2012, et ce, pour la treizième année consécutive. Le
cabinet Interbrand analyse les différentes manières dont une marque bénéficie à
l’entreprise elle-même, tant en terme de satisfaction des attentes clients que
de progression des résultats de l’entreprise. Voici d’ailleurs un tableau
présentant les dix premières positions du palmarès 2013.
Best Global Brand 2013 (6)
RANG
2013
|
RANG
2012
|
NOM DE LA MARQUE
|
PAYS
|
VALEUR
(en millions de $)
|
1
|
2
|
Apple
|
É-U
|
98,316
|
2
|
4
|
Google
|
É-U
|
93,291
|
3
|
1
|
Coca-Cola
|
É-U
|
79,213
|
4
|
3
|
IBM
|
É-U
|
78,808
|
5
|
5
|
Microsoft
|
É-U
|
59,546
|
6
|
6
|
GE
|
É-U
|
46,947
|
7
|
7
|
McDonald’s
|
É-U
|
41,992
|
8
|
9
|
Samsung
|
Corée
du Sud
|
39,610
|
9
|
8
|
Intel
|
É-U
|
37,257
|
10
|
10
|
Toyota
|
Japon
|
35,346
|
SOURCES :
(1) http://www.strategies.fr/actualites/marques/r7744W/la-marque-une-valeur-fantome.html
(2) http://www.e-marketing.fr/Marketing-Magazine/Article/Comment-evaluer-la-valeur-financiere-d-une-marque-4518-1.htm
(3) http://www.e-marketing.fr/Marketing-Magazine/Article/Comment-evaluer-la-valeur-financiere-d-une-marque-4518-1.htm
(4) http://www.lesechos.fr/31/01/2011/LesEchos/20859-58-ECH_comment-estimer-la-valeur-d-une-marque--.htm
(5) http://www.bfmtv.com/economie/coca-apple-ibm-podium-classement-meilleures-marques-monde-348620.html
(6) http://interbrand.com/fr/best-global-brands/2013/top-100-list-view.aspx
J’ai bien aimé votre article, en effet il est toujours très intéressant de voir le palmarès des compagnies dont la marque a le plus de valeur. Il serait par contre intéressant de connaître la méthode utilisée pour en arriver à ces résultats étant donné qu’il semble y avoir un bon nombre de méthode d’évaluation de la marque.
RépondreEffacerLa valeur obtenue selon le choix de la méthode doit certainement varier considérablement étant donné qu’il n’y a pas seulement des aspects quantitatifs, mais également des aspects qualitatifs lorsqu’on évalue la valeur d’une marque de l’entreprise.
Par exemple, sur le site de Deloitte, qui est l’une des trois plus grands cabinets comptables au monde, on mentionne que dans un cas particulier d’une entreprise qui voulait évaluer sa marque afin de la transférer celle-ci d’une filiale à une autre, le cabinet avait utiliser la méthode des redevances qui consistait à déterminer la valeur de la marque d’après son coût de location (en d’autres termes, quel prix le marché serait-il prêt à payer pour utiliser le nom sous une entente de licence, vendre le produit sous licence et pour utiliser son nom ?).
Aussi afin de déterminer la valeur définitive, le cabinet a également utilisé d’autres critère tels que :
• le chiffre d’affaires de l’entreprise et sa croissance prévue;
• le cycle de vie prévu de la marque;
• la chute de la valeur de la marque causée par son vieillissement;
• les impôts
De toute évidence, l’évaluation d’une marque de commerce semble être une tâche très ardue. Alors, quelles sont les raisons qui poussent les entreprises à faire évaluer leurs marques de commerces mis à part les cas de fusion et d’acquisition ?
Source : https://www.deloitte.com/view/fr_CA/ca/secteurs/consommation/fabricantsdebiensdeconsommation/8ddf85ed081fb110VgnVCM100000ba42f00aRCRD.htm
Bonjour,
RépondreEffacerTout d’abord je voudrais vous remercier pour les informations, je les trouve très intéressantes. Le site de Interbrand est quelque chose de très utile. Il semble que la sélection de critères d’évaluation de la marque est une étape assez importante dans le processus. En même temps, dans un autre billet de votre blog (E-réputation, gestion des risques et performance de l’entreprise) vous dites que le risque de réputation est le risque numéro 1 des entreprises et qu’une rumeur négative ou l’influence de médias peuvent facilement détériorer la confiance. Donc, je me demandais, de quelle façon (ou est-ce que) Interbrand en tient compte de ce risque qui semble aussi important?
Excellent point, dernier exemple en date: le rachat de Whatsapp par Facebook pour la coquette somme de 19 milliards de dollars. Whatsapp c’est le gros succès de la messagerie sur smartphone, c’est aussi 450 millions d’utilisateurs fidèles. Donc je suis totalement d’accord avec vous, difficile de justifier les sommes mises sur la table, surtout devant l’aspect abstrait que représentent de tels montants. Mais pouvons-nous réellement justifier ces sommes à l’heure où les rachats de firmes entrainent des écarts d’acquisition si astronomiques qu’aucune commune mesure ne saurait les lier aux effets de synergie attendus ?
RépondreEffacerJe trouve votre propos pertinent dans la mesure où, en tant que futur comptable, nous avons intérêt à nous pencher dès maintenant sur des problématiques qui risquent d’être les nôtres dans un avenir proche. Surtout dans un contexte où des rachats de ce type sont de plus en plus commun.
Ps : Cette remarque s’applique à l’ensemble des contributeurs. Je trouve vos articles agréables à lire, on ressent l’effort de syntaxe. Merci
Bonjour vous trois !
RépondreEffacerComme le mentionne Étienne, il est vrai qu'il existe une multitude de méthodes pour évaluer la valeur financière d'une marque. Donc évidemment, la valeur obtenue selon le choix de la méthode varie considérablement étant donné qu’il n’y a pas seulement les aspects quantitatifs qui sont considérés, mais également les aspects qualitatifs. Et comme je le mentionnais, ces différentes méthodes d'évaluation feront assurément l'objet d'un second billet, ce qui vous aidera, je l'espère, à mieux comprendre le concept de valeur financière d'une marque !
Quant au commentaire de Dima concernant la société Interbrand, la méthode employée par la société n'est pas tout à fait claire. Sur le site Internet, la société parle de l'approche Interbrand et mentionne ceci : « Avoir un outil de mesure précis de la valeur d’une marque est essentiel pour définir la stratégie d’entreprise à adopter. Nous avons été les premiers à utiliser cette évaluation financière en 1984, et à comprendre la nécessité d’aller au-delà des seules propriétés « visuelles » des marques. L’approche Interbrand est la méthode de valorisation la plus généralement reconnue et acceptée. Un grand nombre d’organisations l’acceptent, notamment les cabinets comptables de premier plan, les organismes fiscaux et les instances judiciaires. De plus, l’Organisation Internationale de Normalisation (ISO) a récemment décerné la certification ISO 10668 à notre méthode de valorisation de marque; Interbrand est ainsi le premier cabinet conseil spécialisé en marques à avoir obtenu cette certification. Nous avons réalisé plus de 5 000 missions de valorisation de marque dans le monde entier, en traitant la plupart des secteurs d’activités ». Il n'est malheureusement pas mentionné clairement si la société tient compte du risque de réputation.
Et merci beaucoup Mathieu pour cet autre bel exemple (exemple qui est d'ailleurs pas mal plus récent et d'actualité que ceux énumérés dans mon billet) ! En effet, 19 milliards de $ représentent une somme considérable et il serait intéressant de connaître les raisons et les éléments qui justifient une telle offre.